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An Christine Gräfin Brühl
Si les hommes etoit nés avec un peu de conscience, surement ils seroit confondus et desolés par la loyauté des femmes. La veste plus que belle que Vous aves eu la bonté de m'envoyer charmante amie, me prouve combien Vous etes esclave de Votre parole, ou plus tot combien le devoir de la remplir Vous est cher.
Mille et mille remercimens pour ce beau present, j'y reconnois Votre gout, Votre main, Vous meme, pardonnes! il y a un je ne sai quoi qui Vous ressemble et qui me fait un plaisir infini.
Les graces ont presidé a ce travail, diroit notre cher Wieland et j'entends en meme tems Mephistophele s'ecrier: voila de ce Firlefanz enchanteur qui me fait sauter et rire.
J'ai d'abord envoyé ce chef d'oeuvre au tailleur le plus entendu et j'attends avec impatience le moment de me voir paré de Vos mains.
Vous aves bien diviné que ce don m'arriveroit pour un jour de féte et de gala Mdme la Duchesse [190] Mere apres une maladie dangereuse nous est rendue et nous pouvons esperer de la voir bieutot entierement retablie. C'est en me presentant devant Elle pour la feliciter, pour lui offrir mes voeux, que je porterai pour la premiere fois la piece la plus precieuse de ma garderobe presente et avenir. Pour d'autres fêtes je n'en connois pas et je crains fort que nous en resterons la.
Cette lettre devoit partir il y a quinze jours. Vous pardonneres le retard, la maladie de notre chere Duchesse nous a tenu en suspends jusqu' ici, presque tous les jours critiques j'usqu' au 21. ont été marqués par quelque accident facheux et ce n'est que depuis avanthier que nous respirons librement.
Adieu charmante amie. Bien des compliments pour Maurice. Notre Duc ne lui a point ecrit, a ce que j'ai pu scavoir.
Embrasses le bon Lolo plus qu'a l'ordinaire et que ce soit pour moi que Vous l'embrasses. S'il m'aime un peu c'est parceque je l'aime beaucoup, imites ce bon exemple. Adieu encore une fois.
Weimar ce 12. Marz 1786.
G.